La bouche du cheval est une zone clé pour le bien-être et la bonne santé de l’organisme. Dans la relation avec le cavalier, c’est par la bouche que s’établit le contact qui permet, lorsqu’il est juste, de travailler dans l’harmonie. 

 

On voit malheureusement trop d’artifices qui viennent entacher ce lien et nuire au travail et au bien-être de la monture.

 

Ce deuxième volet sur la série des bridons s’intéresse à l’intérieur de la bouche, en particulier au lien qu'il existe entre un serrage trop fort de la muserolle et une dentition présentant des anomalies ou pathologies.

A cette occasion nous avons interrogé Loïc Hensmans, technicien dentaire équin issu de la formation de l'ESAO (Brighton), qui partage son expérience à ce sujet.

 

« Dans la biomécanique du cheval au travail, les mâchoires supérieure et inférieure sont mobiles l'une par rapport à l'autre. Cette mobilité est latérale (d'un coté à l'autre) ou antéropostérieure (d'avant en arrière) et est possible grâce à l’ATM (Articulation Temporo-Mandibulaire).

 

En fonction de la position de la tête, la mandibule (mâchoire inférieure) est placée différemment par rapport au crâne (mâchoire supérieure). Pour exécuter des mouvements en positionnant correctement sa tête, le cheval devra donc avoir une bouche légèrement mobile.

 

En serrant excessivement la muserolle, les dents vont être serrées, ce qui entravera ces mouvements. Il nous est impossible de nous décontracter ou de faire des mouvements de gymnastique en serrant les dents, pour le cheval c'est pareil. Si la muserolle sert à empêcher l'ouverture de la bouche elle n'est pas faite pour la figer. »

 

En cas de pathologies dentaires non traitées, la muserolle trop serrée pourra devenir un véritable instrument de torture pour le cheval. Abordons le sujet sous trois atteintes fréquentes : les surdents, les dents de loup, les irrégularités d’usure.

 

 « Les surdents sont des pointes d'email très coupantes, localisées sur la mâchoire supérieure du coté des joues, et du coté de la langue sur la mâchoire inférieure. La muserolle française ou la muserolle combinée va plaquer les joues sur ces pointes et occasionner des blessures très douloureuses de la muqueuse et donc des défenses plus ou moins importantes en fonction de la sensibilité du cheval. »

 

 

 

La dent de loup est une petite dent inutile à la mastication et située sur

les barres, devant les prémolaires, juste à l'emplacement du mors.

 

« Une muserolle allemande ou une muserolle combinée ou encore une

muserolle croisée va forcer et maintenir le contact du mors sur cette

dent et provoquer ainsi des douleurs et donc des défenses (cheval qui

"bat à la main"). »

 

 

 

« Certaines irrégularités d'usure des dents entraînent des déviations latérales ou antéro-postérieures de la mandibule et un maintien de celle-ci dans une mauvaise position.

Dans les cas les moins graves le cheval au travail peut compenser ce blocage mécanique en ouvrant la bouche pour mobiliser sa mâchoire inférieure afin d'obtenir le mouvement désiré.

 

En lui maintenant la bouche close avec une muserolle très serrée les deux mâchoires conserveront toujours la même position l'une par rapport a l'autre et une position correcte de la tête sera mécaniquement impossible. »

 

Avant d'utiliser une muserolle il faut donc absolument prendre connaissance de l'état de la dentition de sa monture.

 

 « Travailler avec une muserolle non ajustée jusqu'au passage du dentiste est le premier conseil que je donne aux clients qui reçoivent un cheval sans connaître ses antécédents dentaires. ».

 

Il en va de même lorsque vous suspectez une anomalie ou pathologie dentaire, dans le cas où votre cheval est encore montable.

 

La muserolle peut avoir, indépendamment de la volonté du cavalier, des répercussions douloureuses pour le cheval. Toutefois, la muserolle de filet n’est pas la seule responsable.

Alors qu’on considère et utilise le licol pour des temps de loisir ou détente, on peut retrouver des effets similaires, comme nous l’explique Loïc Hensmans.

 

 « N'oublions pas que le licol a aussi une muserolle. En présence de surdents  un licol très ajusté écrasera les joues sur les dents coupantes.

Même s'il n'est pas trop serré, à chaque tension de la longe la muserolle du licol va plaquer les joues sur les surdents. Le cheval en main pourra devenir difficile à gérer, le cheval à l'attache aura aussi tendance à tirer au renard. Là encore tout dépend de la sensibilité du cheval.

 

Aussi, pour mastiquer le cheval doit ouvrir la bouche avant d'écraser la nourriture entre ses dents. Il faut donc encore une fois desserrer la muserolle du licol lorsque le cheval est au pré ou broute en main.
Le pain, les pommes et autres friandises pour chevaux ont la particularité d'être plus volumineuses que l'alimentation de base (herbe). La possibilité d'ouverture le la bouche devra donc être proportionnelle à la taille de récompense ! »

 

Dans le cadre de la série d’articles sur les muserolles, il me semblait important d’aborder le sujet des pathologies liées à cet harnachement. Lorsqu’un comportement anormal ou non souhaité apparait chez un cheval, on accuse rapidement un manque de volonté, une rébellion, etc. On s’interroge trop peu souvent sur une origine physique, et encore moins souvent sur un problème buccal.

 

Ce sujet vous démontre aujourd’hui qu’une défense traduit souvent un mal-être et

doit attirer votre attention.

 

A nouveau, la question de l’ajustement se pose. C’est un point fondamental à

maîtriser, il impacte en plus du confort du cheval, la qualité du travail que vous

recherchez.

 

Les soins dentaires sont à intégrer pleinement à l’entretien annuel de vos montures.

Soyez consciencieux dans l’ajustement des muserolles, tant du bridon que du licol.

Pensez à l'agrandir lorsque vous récompensez votre cheval avec une friandise et

adaptez l’ajustement lorsque vous le mettez au pré !

 

 

 

 

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